Troupes US en Syrie : Partiront? Partiront pas?

Donald Trump a produit un grand émoi en annonçant ce 19 décembre le retrait total des forces US de Syrie, provoquant la démission de son ministre de la Défense, le général Mattis, suivi de l'émissaire des États-Unis pour la «coalition internationale contre l'Etat Islamique». La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne, membre de la dite coalition, expriment leur inquiétude ; le président français déplore de manque de fiabilité de l'allié étatsunien.

Même consternation dans les médias occidentaux. Le président US "défie la morale", s'indigne Baudouin Loos dans Le Soir, qui feint d'être concerné par le sort des Kurdes, qui "perdent leur rêve d'autonomie", sont "abandonnés par les Américains qui ont utilisé leurs fières milices contre Daesh", et forcés de choisir entre "la peste" d'une attaque turque et "le cholera"... d'une réintégration des territoires qu'ils occupent dans l'état Syrien. Lesquels territoires, tout l'Est du pays, où se trouvent les ressources pétrolières notamment, n'ont pas grand chose à voir avec les régions peuplées de Kurdes syriens avant la guerre.

Car en fait ce qui préoccupe réellement tout ce beau monde, ce n'est bien sûr pas les Kurdes, ou la lutte contre le terrorisme, mais l'apparent renoncement de l'administration Trump à renverser le gouvernement syrien, seul objectif pour lequel les pays occidentaux avaient investis lourdement depuis le déclenchement de la prétendue "révolution syrienne". 

Et c'est bien ce qu'exprime sans trop s'embarrasser d'hypocrisie Jim Mattis dans sa lettre de démission : Le retrait écrit-il, risque de "laisser un vide qui puisse être exploité par le régime Assad". Propos explicitement salués par Macron...

Pour tous ceux qui s'accrochent au prétexte de la "lutte contre le terrorisme", faut-il rappeler à quel point les 18 ans de présence militaire US ont été efficaces contre le terrorisme en Afghanistan ? Ou comment la destruction et l'occupation de l'Irak depuis 2003 a vraiment constitué un coup fatal à al-Qaida et métastases ? Concernant la Syrie, a-t'on bien effacé de nos mémoires le rapport d'août 2012 du renseignement US (DIA) qui "espérait" la création d'un Etat Islamique en Syrie : "Si la situation se détériore, on pourra établir une principauté salafiste officielle ou pas, dans l’est de la Syrie, et c’est exactement ce que veulent les puissances qui soutiennent l’opposition, afin d’isoler le régime syrien"1

«Nous allons ralentir les choses d’une manière intelligente»

Mais l'équipe Trump mettra-t-elle jamais ses bonnes résolutions en exécution, ou en a-t’elle seulement l’intention ? Quelques jours après l'annonce se multiplient les déclarations plus ou moins officielles laissent penser que le retrait pourrait bien durer indéfiniment. Ou ne pas concerner l'ensemble du territoire (les USA occupent également une base dans le sud du pays). Comme le remarquait le président Poutine, « Chaque année, on annonce le départ des troupes américaines d’Afghanistan. Mais elles sont toujours présentes ».

Stephen Gowans estime que par cette annonce, Trump veut juste transférer le fardeau sur les alliés et miser davantage sur les mercenaires2. Et de fait les "forces spéciales" britanniques et françaises sont toujours présentes dans le pays, et leurs gouvernements ont affirmés qu'elles resteraient après le départ des troupes américaines.

Il sera utile d'observer la "part de l'effort" que notre gouvernement, le démissionnaire ou le prochain, sera contraint de mettre dans cette soi-disant « coalition internationale contre Daesh en Syrie »....

1. https://www.legrandsoir.info/l-occident-facilitera-la-montee-de-l-etat-islamique-afin-d-isoler-le-regime-syrien-lit-on-dans-un-document-de-la-defense.html
2. https://www.investigaction.net/fr/117672/

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