Commémoration de l'assassinat de Julien Lahaut à Seraing
Message de la fédération de Liège du PCB, prononcé par de Cde Marc Tondeur :
Seraing, le 17 août 2024
Chers camarades et amis,
Cette année la commémoration survient après une large victoire de la droite lors des dernières élections que Julien Lahaut n’aurait certainement pas manqué de commenter.
En Wallonie et à Bruxelles,
cette victoire se concrétise par le renforcement du MR et une spectaculaire percée de la droite chrétienne après une campagne particulièrement interpellante.
Sous l’étiquette « Les Engagés » la droite chrétienne a offert sa tête de liste à l’ex-président du patronat wallon (UWE) Olivier De Wasseige. Ces Engagés démontrent ainsi pour qui et pour quelle classe ils s’engagent et prouvent surtout qu’ils tournent le dos au Mouvement Ouvrier Chrétien. Au MR, les déclarations du député Jeholet, qui invitent ceux qui défendent le port du voile à quitter le pays, en dit long sur l’évolution de ce parti.
Sur la chaîne RTL, sa collègue Mme Galand lui emboîte le pas en considérant que les chômeurs sont « Des gens qui ne veulent pas travailler parce qu’ils ont des revenus trop importants ».
Nous rappelons que depuis le 1erer mai 2024, un chômeur avec charge de famille dont deux enfants perçoit avec ses allocations familiales 200 euros de moins que le seuil de pauvreté d’une famille avec deux enfants fixé à 2715 euros.
Avec ce qu’elle qualifie de « revenus trop importants » nous invitons Mme Galand à faire face au coût de la vie, dont les loyers qui atteignent en moyenne 750 euros en Wallonie. En cumulant des revenus de députée fédérale et régionale avec celui de bourgmestre, elle bénéficie d’un statut social plus que confortable qui ne lui permet certainement pas de juger ou de donner des leçons aux chômeurs. Apparemment au MR, les mythes des années 70 du chômeur qui allait « pointer en Cadillac » ou du malade imaginaire italien qui chantait « que la vie est belle à la mutuelle » ont la vie longue.
Les déclarations de Georges-Louis Bouchez, qui remettent en cause la gestion du chômage par les syndicats, rappellent les exigences patronales d’imposer une personnalité juridique à ces organisations pour mieux les détruire.
Pour inciter les chômeurs à travailler, le MR défend sa potion miracle qui consiste à instaurer une différence de 500 euros entre les revenus des gens qui travaillent et les chômeurs. Bien sur, pour le MR cette différence n’est pas à rechercher dans une augmentation des salaires mais dans une réduction des allocations de chômage dans le temps. Il pourrait difficilement en être autrement pour un MR qui relaye constamment les plaintes du patronat sur les salaires trop élevés, qui soutient le blocage des salaires depuis 1996 et qui remet en cause leur liaison automatique au coût de la vie.
Lahaut aurait également démontré que le recul constant du PS et la défaite cinglante d’Ecolo en Wallonie ne sont pas étrangers à leur soutien au dernier gouvernement. Leur complicité dans la campagne anti-PTB qui est qualifié d’anti-démocratique et est amalgamé avec le VB, n’a pas valorisé leur image.
Le PS et Ecolo n’ont pas compris que leur salut en Wallonie est indissociable d’un rassemblement incluant le PTB avec les syndicats et toutes les femmes et hommes de progrès qui défendent ce que feu Marc Goblet qualifiait de patrimoine social, c’est-à-dire celui de ceux qui n’ont pas de patrimoine familial. À Bruxelles le PS persiste et signe dans cette voie en s’orientant vers une coalition avec le MR et les Engagés.
Si les résultats du PTB confirment son avancée significative à Bruxelles et particulièrement réjouissante en Flandre, son tassement dans son fief Wallon est interpellant. Avec des scores de 3 à près de 5% dans certaines circonscriptions, l’apparition du mouvement « Chez nous » qui est parrainé par les ténors de l’extrême droite européenne est préoccupante. Elle nous rappelle que la précarité et l’exclusion sont le terreau du nationalisme et du fascisme.
En région flamande,
la victoire de la NVA n’est pas étrangère à l’inertie du Vlaams Belang. C’est la victoire de la droite la plus réactionnaire, et de son leader Bart De Wever qui entraine dans son sillage le CD&V, Vooruit et l’Open VLD. En avouant « mon patron c’est le patronat », et en se considérant comme le fils spirituel du philosophe réactionnaire Edmund Burke, De Wever annonce une couleur qui n’est pas de bonne augure. Même s’il s’en est défendu durant toute la campagne, un rapprochement de la NVA avec le Vlaams Belang n’est pas à exclure. Un tel rapprochement, qui relancerait le projet confédéral, serait catastrophique pour la Wallonie et Bruxelles.
Julien Lahaut n’aurait pas manqué de démontrer la collusion entre la droite du nord et du sud du pays. Un gouvernement fédéral composé du MR, des Engagés et de la NVA présidé par Bart De Wever aura des conséquences négatives pour tous les travailleurs et allocataires du pays. Un tel rapport de force ouvre la voie d’une remise en cause de l’ensemble des conquêtes sociales. Les dernières injonctions de la commission européenne qui exige que la Belgique réduise ses dépenses budgétaires de 27 milliards ne manqueront pas de conforter les arguments de ce futur gouvernement. Il ne serait pas étonnant qu’une telle mouvance libère le Vlaams Belang de son cordon sanitaire pour entraver la gauche radicale et les syndicats.
Avec ses talents de tribun, Lahaut n’aurait certainement pas manqué de dénoncer les pontes du MR et des Engagés qui nous avaient juré leur grand dieu de ne jamais s’allier avec la NVA, un parti qui doit sa notoriété en Flandre à une scandaleuse propagande dirigée depuis plus de vingt ans contre la population wallonne.
Dans tout le pays, la victoire de la droite est surtout celle de ses médias et du fric, qui s’apparente de plus en plus à une campagne à l’américaine. Durant cette campagne, le recours aux réseaux sociaux a favorisé une communication réduite à sa plus simple expression au détriment de la réflexion. Elle a favorisé une extension de la dépolitisation qui se traduit par 1.050.000 abstentionnistes (12,5% du corps électoral) et 416.000 bulletins blancs.
Des experts en communication nous apprennent que les mouvements d’extrême droite sont les plus actifs et les plus populaires sur les réseaux sociaux plébiscités par la jeunesse comme Instagram et TikTok. Ceci est confirmé par les récentes émeutes racistes au Royaume-Uni.
Sur le plan international,
en tant qu’anciennevictime du nazisme, Julien Lahaut, se serait indigné de la montée de l’extrême droite et du nationalisme qui refont surface partout et menacent la paix mondiale. Il aurait salué le Nouveau Front Populaire que nos amis français ont constitué en se mobilisant pour faire barrage au Rassemblement National.
Comme nous, il aurait démontré que le conflit russo-ukrainien est une guerre de la coalition des États-Unis et de l’UE contre la Russie dans laquelle l’Ukraine n’est qu’un champ de bataille où le sort des populations ne compte pas.
Ce conflit est une conséquence de la disparition de l’URSS qui a contribué à l’affaiblissement de l’Ukraine. Cet affaiblissement a relancé des tensions nationalistes ce qui a permis à des organisations fascistes d’intégrer le gouvernement. Ces organisations ont réhabilité des nazis ukrainiens comme Bandera et Choukhievitch dans un pays où le nazisme a coûté la vie à près de 7 millions d’habitants (16,3%).
En refusant la présence de la Russie à la commémoration du débarquement en Normandie, le président Macron a empêché les vétérans qui avaient participé à cet événement, de rencontrer les derniers survivants des batailles de Koursk et de Stalingrad sans lesquelles aucun débarquement n’aurait pu avoir lieu.
Vu le grand âge de tous ces braves, leur rencontre était l’ultime occasion d’amorcer un dialogue entre l’Ukraine et la Russie pour désactiver l’escalade belliciste et le climat de russophobie qui menace directement la paix mondiale.
Malheureusement, Macron en a décidé autrement. Aujourd’hui, il ne plaide plus pour le dialogue, il évoque la possibilité d’envoyer directement des troupes en Ukraine pour combattre la Russie et promouvoir le commerce des armes.
Tout en désapprouvant l’intervention russe, nous pensons que la résolution de ce conflit exige la prise en compte des arguments de la Russie à propos des menaces de l’extension de l’OTAN à ses frontières.
Au Moyen-Orient, l’aggravation du conflit israëlo-palestinien aboutit à un véritable génocide des populations de Gaza où on dénombre déjà 39000 morts et 89000 blessés.
Cette tragédie n’est pas étrangère à une extrême droite qui gangrène le gouvernement israélien en considérant les Palestiniens comme des animaux bipèdes. Elle prouve que l’état d’Israël poursuit ses ambitions expansionnistes. Au lieu des 15000 km² qui lui étaient attribués par l’ONU en 1947, Israël contrôle aujourd’hui plus de 33000 km² par l’annexion du territoire Syrien du Golan et le grignotage des territoires palestiniens de la Cisjordanie en violation continue du droit international. Lahaut aurait souligné que la poursuite d’une telle monstruosité est impossible sans le soutien de l’UE et le parrainage des États-Unis et de son lobby sioniste qui considèrent Israël comme leur 51e état. Alors qu’il était encore président de la commission de l’UE, notre ex premier De Croo a déclaré à Netanyahou « nous sommes avec vous ». Cette déclaration confirme le soutien inconditionnel de l’UE qui assure qu’Israël ne sera jamais sanctionné et qu’il peut poursuivre son expansion génocidaire.
Malgré ce sombre tableau, et par tous les moyens, nous devons honorer les valeurs du mouvement ouvrier organisé qui ont guidé la vie de Julien Lahaut et qui sont indispensables pour faire face à la réaction.
Nous devons tout faire pour faire renaître l’esprit du Front Populaire qui fut l’expression de la solidarité de classe contre le fascisme et qui est certainement le meilleur moyen d’honorer la mémoire de Lahaut.
Comme nos amis français, les prochaines élections communales doivent être un second tour pour unifier la gauche face au rassemblement de la droite.
Faisons nôtre l’exemple de Julien Lahaut,
Vive l’unité de la gauche et de tous les travailleurs !